Un jour (et une nuit) dans la vie d’une… inhalothérapeute au laboratoire du sommeil!
27 Décembre 2017
Le laboratoire du sommeil de l’Hôpital de Montréal pour enfants a ouvert ses portes en 1990. Il a d’abord été installé dans un bureau converti en laboratoire, et on y recevait seulement un patient de nuit par mois. Vingt-sept ans après, le laboratoire du sommeil a pris énormément d’envergure, aussi bien sur le plan du nombre de patients que de l’espace physique.
Et l’inhalothérapeute Sylvia Ladan a été là pour voir toute cette évolution.
Activités de jour
Le laboratoire pédiatrique du sommeil a des activités de jour et de nuit. Sylvia travaille avec Diana Zinno, chef adjointe du laboratoire de la fonction pulmonaire et du sommeil pour les services d’inhalothérapie pédiatrique, ses collègues inhalothérapeutes Angie Penta, Isabelle Blanchette et Georgia Kotsirilos, et l’agente d’administration Marisa Campellone. Elles trient les demandes de consultation et travaillent avec les spécialistes du sommeil chez les enfants, le Dr Robert Brouillette et la directrice du laboratoire pédiatrique du sommeil, la Dre Evelyn Constantin. Durant la journée, l’équipe évalue les patients qui lui sont envoyés pour des problèmes présumés d’apnée obstructive du sommeil ou d’autres troubles du sommeil. Les patients retournent ensuite à la maison avec un oxymètre, petit dispositif médical portatif qui mesure le taux d’oxygène dans le sang et la fréquence cardiaque pendant qu’ils dorment. Ces données aident l’équipe à exclure l’apnée obstructive du sommeil ou d’autres problèmes respiratoires pendant le sommeil.
« Nous montrons aux parents comment installer l’appareil à la maison en fixant une sonde sur un orteil de leur enfant, explique Sylvia. Nous utilisons l’oxymètre comme test de dépistage afin de déterminer si le patient présente un taux anormal d’oxygène et s’il est nécessaire qu’il passe une nuit au laboratoire du sommeil de l’hôpital pour une étude plus détaillée de son sommeil. » L’équipe du laboratoire du sommeil peut remettre jusqu’à six appareils par jour à des patients, mais la liste d’attente demeure longue parce que la demande est forte pour ce type d’évaluation. Dans certains cas, l’équipe renvoie le patient à la maison avec un dispositif Actiwatch, un moniteur d’activité semblable à un Fitbit. Le dispositif, qui se porte au poignet, mesure la lumière et l’activité pour déterminer le schéma de sommeil et d’éveil de l’enfant. « Nous voyons une grande variété d’enfants qui présentent différents troubles du sommeil, comme l’apnée obstructive et centrale du sommeil, les terreurs nocturnes, le somnambulisme, le syndrome des jambes sans repos et la narcolepsie, rapporte Sylvia. Et nous rencontrons des patients de tous âges, de la naissance à l’adolescence. »
Diagnostiquer les troubles du sommeil pendant la nuit
Dans les cas les plus sérieux, on demandera au patient de venir passer une nuit au laboratoire du sommeil pour être mis en observation et passer ce qu’on appelle le test de polysomnographie. Ce test, qui sert à diagnostiquer les troubles du sommeil, mesure les ondes cérébrales, les mouvements oculaires, les taux d’oxygène et de dioxyde de carbone, la fréquence cardiaque et respiratoire ainsi que les mouvements des jambes de l’enfant pendant son sommeil. Chaque étude peut durer entre huit et neuf heures, et le laboratoire du sommeil peut ainsi faire deux études de nuit, trois nuits par semaine. Un parent dort aux côtés de l’enfant, qui lui est couché dans un berceau ou un petit lit et est observé sans interruption toute la nuit par un inhalothérapeute installé tout près dans la salle de contrôle.
« D’ordinaire, nos patients arrivent vers 18 h 30, et l’inhalothérapeute commence à mettre les électrodes en place », raconte Sylvia, qui jusqu’à récemment travaillait de nuit. Plus de 25 capteurs sont fixés sur le patient, de la tête aux orteils. On place deux sangles respiratoires autour de la poitrine et de l’abdomen pour surveiller la respiration, treize capteurs d’EEG sur la tête et le visage, un capteur de ronflement sur le cou pour surveiller les vibrations, et un capteur de débit nasal.
Pendant que le patient dort, les inhalothérapeutes analysent toutes les données en temps réel. Elles observent l’état de sommeil de l’enfant, les taux de désaturation, les rythmes respiratoires, les différences en dioxyde de carbone et l’activité des muscles. « Nous évaluons et analysons tous ces mécanismes toutes les 30 secondes, puis nous revenons le lendemain pour examiner plus attentivement les données et les noter », explique Sylvia. La notation est une analyse quantitative des données qui permet d’évaluer la gravité du trouble du sommeil. Un enregistrement de neuf heures contient plus d’un millier de segments de données, et chacun d’eux doit être noté. Cette analyse peut prendre jusqu’à 4 heures par patient. Une fois que l’inhalothérapeute a noté l’étude, le médecin spécialiste du sommeil interprète le test de polysomnographie, puis fait le diagnostic et les recommandations. « On note les nourrissons différemment des enfants, et les résultats sont parfois plus difficiles à interpréter, précise Sylvia. En fait, les différentes phases du sommeil sont très différentes chez les nouveau-nés par rapport aux enfants plus âgés. »
Sylvia explique que les inhalothérapeutes qui travaillent au laboratoire du sommeil acquièrent un savoir-faire unique pour installer leurs patients de façon à ce qu’ils soient suffisamment bien pour s’endormir. « Nous mettons les capteurs en place quand l’enfant est réveillé, mais cela peut être très difficile dans certaines situations, surtout chez les plus jeunes patients qui demandent plus d’attention », ajoute-t-elle. Certains patients arrivent avec leur propre équipement, comme des appareils de ventilation à pression positive continue (CPAP) qui doivent être réglés par l’inhalothérapeute durant la nuit. « Il faut être très polyvalents et très habiles avec la technologie », dit Sylvia, qui en plus d’être diplômée en inhalothérapie a une certification supplémentaire de technologue agréée en polysomnographie. « C’est vraiment un travail que vous apprenez sur le terrain et pour lequel vous devenez très compétent. Nous avons toujours un œil sur le patient et un œil sur les données. » Et si un patient a trop de mal à respirer ou a besoin d’une intervention immédiate, le médecin de garde et l’inhalothérapeute prendront les mesures nécessaires pour transférer le patient à l’urgence ou l’hospitaliser pour qu’il reste en observation et soit traité si nécessaire.
« C’est vraiment pénible de voir un enfant lutter pour respirer pendant qu’il dort, dit-elle. Le sommeil a une telle influence sur la qualité de vie et le comportement d’une personne. Alors, c’est vraiment gratifiant quand le trouble de sommeil du patient est réglé et qu’il peut finalement avoir un sommeil réparateur. Ça change vraiment sa vie. »