Le dilemme du mal de ventre
7 mai 2007
Il est environ 17 heures, ça fait huit heures que votre enfant est fiévreux, son nez coule, il a la peau moite et il n’arrête pas de pleurer. Naturellement, vous vous faites du souci et vous décidez de consulter le médecin. Mais où aller ? Chez le médecin le plus proche, au CLSC ou à l’urgence d’un hôpital ?
Selon le Dr Dominic Chalut, directeur de la médecine d’urgence à l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME) du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), c’est le dilemme courant des parents. On peut les comprendre, ils souhaitent un diagnostic et un traitement immédiats pour l’enfant, mais l’urgence d’un hôpital est-elle vraiment la meilleure option, même le soir ou la nuit ?
« L’urgence de l’HME prodigue des soins de santé d’une qualité exceptionnelle », dit le Dr Chalut. « Mais ce n’est pas nécessairement le meilleur endroit pour soigner immédiatement des cas non urgents, comme des maux de ventre et des rhumes. » À l’urgence de l’HME, les enfants sont évalués cas par cas et non selon la règle du premier arrivé, premier servi, pour que l’enfant le plus malade soit soigné en premier. Les enfants qui ne sont pas des cas urgents sont donc souvent rétrogradés sur la liste d’attente quand arrive un cas ayant une priorité plus haute.
« Les délais d’attente à l’urgence peuvent changer rapidement et sont difficiles à prévoir », dit le Dr Chalut. « Il n’est pas rare qu’un enfant évalué comme cas non urgent doive attendre des heures pour être traité » L’HME compte l’une des urgences pédiatriques les plus occupées au Canada : plus de 65 000 patients par année. Selon le Dr Chalut, un grand nombre de ces cas ne sont pas des urgences. La situation engendre donc une pression indue sur le personnel de l’urgence et de la frustration chez les familles inquiètes en attente d’un traitement.
La plupart des parents savent que les visites à l’urgence sont rarement brèves. Pourquoi donc se précipitent-ils en si grand nombre à l’urgence pour des affections sans gravité ? Tout simplement parce qu’ils sont inquiets pour l’enfant et incertains de la gravité de la maladie. « C’est bien naturel de jouer de prudence », dit le Dr Chalut. En fait, les enfants sont rarement aussi malades que le croient les parents. Au cours des deux premières années, les enfants tombent très souvent malades et font souvent de la fièvre pendant plusieurs jours. « À Montréal seulement, on estime qu’il y a toujours de 2 000 à 3 000 enfants qui ont de la température », dit le Dr Chalut.
Tout naturellement aussi, la période de pointe de l’urgence est le soir, quand la plupart des cabinets de médecin et des CLSC sont fermés. « Chacun sait que l’urgence est ouverte 24 heures par jour et 7 jours par semaine. Mais les patients seront surpris d’apprendre qu’un grand nombre de médecins de famille acceptent les appels même après les heures de fermeture des bureaux. » Pour certains patients, toutefois, l’urgence est la première option pour des soins de santé, car ils n’ont pas de médecin. Le Dr Chalut recommande donc de recourir, si possible, aux médecins de proximité et donne des renseignements sur les CLSC. « Les centres locaux sont les mieux placés pour traiter les affections mineures », dit le Dr Chalut. « Les médecins y développent des relations avec leurs patients et peuvent être au courant de l’état de santé de chacun ; c’est là un avantage dont nous sommes privés, à l’urgence. »
Mais, tout bien considéré, il faut toujours se rendre à l’urgence en cas de doute. « Nous voulons simplement donner à nos patients ce qui est le mieux pour eux, donc leur donner l’information nécessaire pour prendre de bonnes décisions », dit le Dr Chalut. « Vous êtes inquiets ? Suivez le principe de précaution et rendez-vous à l’urgence. »
Par Ian Popple – CUSM