Le miroir brisé : comprendre la vision déformée du corps chez l’enfant et l’adolescent
3 février 2014
Nous pouvons tous comprendre ce qu’on ressent quand on n’aime pas un aspect de notre apparence : on aimerait être plus grand, avoir un plus petit nez ou un teint impeccable. Certaines de ces imperfections peuvent nous déranger, mais nous les acceptons comme faisant partie de l’être humain et nous faisons en sorte qu’elles n’empiètent pas trop sur notre vie au quotidien.
Cependant, les enfants et les adolescents qui ont une vision déformée de leur corps — comme c’est le cas avec les troubles alimentaires — passent des heures à ruminer sur leurs défauts réels ou imaginaires. « Quand la vision négative du corps devient si oppressante et douloureuse qu’elle interfère avec la vie quotidienne d’un enfant ou d’un adolescent, c’est le signal qu’il y a autre chose qui se passe », rapporte la Dre Holly Agostino, spécialiste en médecine de l’adolescence à l’Hôpital de Montréal pour enfants.
Qu’est-ce que la distorsion de l’image corporelle?
La distorsion de l’image corporelle (dysmorphie corporelle) se caractérise par la préoccupation constante et envahissante d’une personne pour un défaut physique imaginaire ou léger. « Cette personne ne voit pas son corps comme les autres le voient, et elle n’arrive pas à croire les gens qui lui disent qu’elle paraît bien », explique la Dre Agostino.
En réalité, un défaut perçu peut être très léger, voire inexistant, mais pour une personne qui a une vision déformée de son corps, cette imperfection est capitale, et elle est souvent la cause d’une grave détresse émotionnelle et de difficultés à fonctionner au quotidien. Certains enfants ou adolescents peuvent s’absenter de l’école ou du travail, éviter les interactions sociales et s’isoler, même de leur famille et de leurs amis.
« Cette image déformée du corps peut alimenter les mauvaises habitudes et les tentatives pour contrôler ou modifier les imperfections perçues, parfois par des mesures drastiques, comme restreindre l’apport alimentaire ou faire trop d’exercices, espérant ainsi “régler” le problème », explique la Dre Agostino.
En quoi la distorsion de l’image corporelle diffère-t-elle de la préoccupation normale d’un adolescent pour son apparence?
Les enfants et les adolescents qui s’en font avec une dysmorphie corporelle peuvent trouver difficile de se concentrer sur autre chose que les imperfections et défauts qu’ils perçoivent.
Un adolescent aux prises avec une dysmorphie corporelle peut :
- mettre l’accent de façon disproportionnée sur une ou plusieurs imperfections quand il parle de son corps;
- refuser de croire qu’il paraît bien, même après avoir été rassuré à maintes reprises par ses parents et amis;
- exprimer des craintes à l’idée de prendre du poids (si le poids est la principale préoccupation), de ne pas pouvoir cacher l’imperfection, etc.;
- s’éloigner de sa famille et de ses amis, préférant s’isoler;
- s’absenter de l’école ou du travail de peur que les autres voient ses imperfections.
Que peuvent faire les parents pour aider?
« C’est très important que les parents parlent à leurs enfants s’ils remarquent des changements de comportement, en particulier dans leur façon de parler d’eux-mêmes et de leur corps », précise la Dre Agostino.
« Les parents ont une grande influence sur la vie de leur enfant, et il est important de souligner que les enfants reproduisent les comportements qu’ils voient autour d’eux. »
Si, comme parent, vous observez un changement de comportement qui vous inquiète chez votre enfant, il peut être bon d’en parler à un professionnel de la santé. « Plus tôt un enfant ou un adolescent est traité, meilleures sont ses chances de se rétablir complètement », affirme la Dre Agostino.