Après quatre ans et demi sous dialyse, un ado voit sa vie changée grâce à un échange de rein
4 juillet 2022
Il arrive que des amis échangent des vêtements. Mais un rein ? Un échange de rein, ou transplantation de rein, a eu lieu récemment à Montréal entre des personnes qui ne se connaissaient pas, ce qui a donné à Halil un nouveau départ dans la vie.
Entre 12 et 17 ans, Halil a été un habitué de l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME). Trois jours par semaine pendant cinq heures, il a été branché à une machine de dialyse vitale qui éliminait les déchets et l’excès de liquide de son sang. Année après année, il a attendu et attendu une greffe de rein.
Les symptômes ont commencé quand Halil était à la maternelle – nausées, vomissements, fatigue. Malgré ses visites incessantes chez son pédiatre, la cause de ses maux restait insaisissable.
En 2017, au début de l’école secondaire, ses symptômes se sont intensifiés et de fortes crampes ont aggravé sa souffrance. Un test sanguin a donné des résultats alarmants. Son médecin a conseillé aux parents d’emmener Halil à l’HME le plus vite possible. Le garçon de 12 ans souffrait d’insuffisance rénale aiguë et était au bord de la crise cardiaque. Halil a été admis à l’unité de soins intensifs.
Ce fut le début d’une dialyse qui a duré quatre années et demie.
Halil souffre d’une mutation génétique rare qui a déclenché une maladie rénale, puis une insuffisance rénale. La dialyse le maintiendrait en vie, certes, mais un nouveau rein lui redonnerait une vraie vie.
La mère de l’adolescent, Aysegul, et son père, Sevket, voulaient lui donner un rein, mais le groupe sanguin de sa mère en fait une donneuse incompatible. Son père a subi des tests pour découvrir qu’il souffrait de diabète et ne pouvait pas se priver d’un rein.
Dès que l’HME a découvert que les parents ne pouvaient pas faire de don, Halil a été placé sur la liste d’attente pour recevoir un rein d’un donneur décédé. En moyenne, au Canada, l’attente pour un rein est de quatre ans.
Les conséquences de la pandémie
Puis le 11 mars 2020, le monde s’est refermé. L’Organisation mondiale de la santé a officiellement déclaré que la COVID-19 était une pandémie.
Celle-ci a eu de graves répercussions sur les dons et les greffes d’organes.
Transplant Québec estime que la pandémie a fait diminuer les dons et les greffes d’organes de 20 % en 2020. L’HME n’a pas fait exception. Les mesures de confinement ont forcé l’hôpital à arrêter puis à redémarrer son programme de transplantation. De plus, il y avait une pénurie d’organes. Dans une telle situation, Halil et sa famille ne pouvaient qu’attendre.
Enfin, en mai 2021, un rein de donneur décédé avec un groupe sanguin compatible est devenu disponible. Halil a été préparé pour la chirurgie, mais elle a été interrompue à la dernière minute.
Avant la transplantation, l’une des dernières étapes consiste à comparer les anticorps de l’organe et l’antigène leucocytaire humain (HLA) du receveur. Ils ne correspondaient pas, ce qui signifiait que le système immunitaire de Halil rejetterait probablement le nouvel organe. Halil et sa famille étaient dévastés.
Le cauchemar de l’attente a repris
À ce moment-là, Halil était sur le point d’avoir 17 ans. À 18 ans, il quitterait les soins pédiatriques à l’HME et serait transféré aux soins pour adultes. Les enfants de moins de 18 ans sont prioritaires pour la transplantation au Québec. La liste d’attente chez les adultes est beaucoup plus longue.
La Dre Indra Gupta, néphrologue à l’HME et médecin de Halil, a attiré l’attention de la famille sur le Programme de don croisé de rein du Canada. Ce programme interprovincial géré par la Société canadienne du sang a débuté en 2009. Un échange croisé de rein, ou jumelage, a lieu lorsqu’un donneur de rein vivant est incompatible avec le receveur, mais l’est avec une autre personne sur la liste d’attente.
Le programme permettrait à la mère de Halil de donner un rein à un receveur inconnu et à son fils de recevoir un rein d’un donneur anonyme compatible. Ces échanges peuvent parfois s’étendre à de grandes chaînes de donneurs, augmentant encore davantage l’impact du don. Dans le cas de Halil, trois donneurs ont donné un de leurs reins à trois personnes inscrites sur la liste d’attente pour une greffe. Les donneurs et receveurs habitent tous dans la grande région de Montréal.
Ce n’est que la troisième fois qu’un patient et un donneur participent à un échange de rein à l’HME.
L’organisation des interventions chirurgicales pour un échange de rein est un défi logistique, en particulier lors d’une pandémie. Les chirurgies ont eu lieu à l’HME, à l’Hôpital Royal Victoria, au CHUM et à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Chaque hôpital doit disposer d’une salle d’opération, assurer la disponibilité d’un suivi post-opératoire et disposer de chirurgiens transplanteurs, d’anesthésistes et d’autres professionnels de la santé.
La mère de Halil s’est remise de son opération et se sent parfaitement bien aujourd’hui. Halil a passé deux semaines à l’hôpital, dont quelques jours aux soins intensifs. Après l’opération, il s’est immédiatement senti mieux.
Aujourd’hui, il ne vient à l’hôpital que pour un examen de 30 minutes chaque semaine avec la Dre Gupta et Angela Burns, l’infirmière de transplantation de l’HME, pour s’assurer qu’il n’y a pas de rejet d’organe. Il se sent toujours fatigué, mais cela diminuera probablement à mesure que son équipe soignante peaufinera sa médication. Il a hâte de commencer le cégep en août. Son expérience en tant que patient à l’HME l’amène à envisager une carrière en médecine.
Quant au donneur de Halil, il ou elle reste anonyme pour lui. Idem pour le receveur du rein d’Aysegul. Bien que les noms des autres donneurs et receveurs restent un mystère, ce que l’on sait, c’est que cet échange a été le partage d’un vrai don de vie.
Un immense merci à tous ceux qui soutiennent la Fondation de l’HME. Vos dons financent le programme de néphrologie de l’hôpital et les recherches de la Dre Gupta, qui visent à comprendre l’origine des malformations congénitales des reins et des voies urinaires.