Faire partie d’Équipe Canada
20 Décembre 2016
Au cours des 33 années pendant lesquelles elle a travaillé à l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME), Lyne Martinelli a appris à connaître bien des patients. Mais, il y a une jeune fille que Lyne connaissait bien avant qu’elle soit une patiente de l’hôpital. Raphaëlle Tousignant est la petite-fille par alliance de Lyne. Quand elle a été admise à l’HME en 2012, ç’a été le début d’un très long périple qui allait demander de la force et de la détermination de sa part et de la part de toute sa famille.
À 9 ans, Raphaëlle était une jeune fille active, athlétique et passionnée de ringuette. Après une chute sur la glace, une bosse est apparue sur sa hanche droite, mais elle n’en a pas vraiment fait de cas. Toutefois, comme la bosse ne semblait pas vouloir se résorber, sa mère a pris rendez-vous chez leur pédiatre. « Le médecin pensait qu’il n’y avait rien de grave, étant donné que j’avais remarqué la bosse après ma chute sur la glace; mais par prudence, il a suggéré de faire d’autres examens », raconte Raphaëlle.
Une biopsie a révélé quelque chose de bien plus sérieux, et Raphaëlle a été confiée aux bons soins de la Dre Sharon Abish, oncologue pédiatre à l’Hôpital de Montréal pour enfants. Rapidement, Raphaëlle a commencé à être traitée pour un ostéosarcome, un cancer des os présent surtout chez les enfants et les adolescents.
Un long chemin à parcourir
Le diagnostic a été suivi de huit mois de chimiothérapie intensive. Raphaëlle et sa famille ont fait bien des allers-retours à l’hôpital, partageant leur temps entre la clinique de jour en oncologie et l’unité de soins où Raphaëlle devait parfois passer la nuit. « L’objectif était de réduire suffisamment la tumeur par la chimiothérapie afin qu’elle soit plus facile à enlever », explique la Dre Abish. Malheureusement, Raphaëlle, sa famille et son équipe de soins ont dû encaisser une nouvelle déchirante : la chimiothérapie n’avait pas pu réduire la tumeur et Raphaëlle devait subir une hémipelvectomie, opération majeure consistant à amputer sa jambe droite, sa hanche et une partie de son bassin.
« Cela n’a pas été facile », raconte Valérie, la mère de Raphaëlle. Suivant le conseil des médecins, elle et son mari ont annoncé la nouvelle dévastatrice à Raphaëlle. « Nous nous sommes assis avec Raphaëlle et lui avons annoncé qu’elle devait renoncer à sa jambe pour sauver sa vie, raconte Valérie. Sa première inquiétude a été de savoir comment elle pourrait encore jouer à la ringuette sans sa jambe. »
C’est le Dr Robert Turcotte, chirurgien oncologue, qui a pratiqué l’opération. « Nous essayons toujours de retirer l’os en conservant le membre; mais dans le cas de Raphaëlle, ce n’était pas possible », explique-t-il. L’opération a duré 12 heures et a nécessité 10 transfusions de sang; par la suite, Raphaëlle a passé une semaine aux soins intensifs, suivie d’un mois à l’unité de chirurgie et d’une autre série de chimiothérapie. Les Drs Abish et Turcotte conviennent que la force et la détermination de Raphaëlle et de sa famille l’ont aidée à passer à travers les traitements, l’opération et le processus de guérison.
Un courage exceptionnel
Valérie Lamarche, infirmière à l’unité d’hématologie-oncologie, devait souvent remplacer les pansements qui recouvraient la plaie chirurgicale de Raphaëlle, une procédure nécessaire, mais terriblement douloureuse. « Raphaëlle était tellement vaillante. Au début, c’était vraiment difficile, mais ensemble, on a mis en place une routine pour changer les pansements, et avec beaucoup de courage, elle nous laissait faire notre travail. » Valérie se souvient du jour où elle a demandé quelle était la princesse Disney préférée de Raphaëlle, qui a répondu Mérida dans le film Rebelle. « Mérida était une réponse plutôt inattendue, mais qui convenait à merveille tellement Mérida est un personnage fonceur et fort », souligne-t-elle.
Peu après son opération, alors qu’elle était encore hospitalisée, Raphaëlle a dû affronter la redoutable épreuve consistant à sortir de son lit pour éviter que ses muscles ne s’atrophient. Après des semaines à l’hôpital, tout ce que voulait Raphaëlle, c’était de rentrer à la maison. « Ça m’a incité à travailler fort pour prendre du mieux », dit-elle. Un jour, son père a eu l’idée de lui faire connaître le hockey sur luge, afin que Raphaëlle puisse rester active et continue de s’amuser en pratiquant un sport de glace. « Quand je suis retournée sur la glace, j’ai essayé le hockey sur luge et je suis tombée en amour avec ce sport! »
De retour sur la glace
Depuis trois ans, Raphaëlle joue au hockey sur luge; sa passion pour ce sport saute aux yeux, et elle s’illumine quand elle en parle. « J’ai des amies dans l’équipe qui ont des emplois formidables, qui voyagent et qui passent du temps avec leur amoureux. Elles peuvent mener une vie normale malgré leur handicap. »
La force de Raphaëlle est bien visible même sur la glace : son jeu est physique et compétitif, et elle ne perd jamais la rondelle des yeux. Elle et son style de jeu ne sont pas passés inaperçus en août dernier quand elle s’est jointe à l’équipe canadienne de hockey sur luge. À 14 ans, elle est la plus jeune de l’équipe, et elle a déjà voyagé à travers le Canada et l’Europe pour participer à des tournois et des matches d’exhibition.
La présence de Raphaëlle au sein de l’équipe canadienne ne met pas un terme à ses rêves. « Je veux que le hockey sur luge chez les femmes devienne assez populaire pour être un sport paralympique; et mon objectif est de participer aux jeux de 2022 », ajoute-t-elle.
La fierté de sa famille ne fait aucun doute : lors d’une visite à l’hôpital récemment, la mère de Raphaëlle a remis une copie personnalisée de la photo officielle de Raphaëlle au sein de l’équipe canadienne aux nombreuses personnes qui ont fait partie de l’équipe de soins de sa fille. Le petit frère de Raphaëlle a aussi fait sa part en portant la lourde luge pendant la visite. Lyne partage souvent des photos de Raphaëlle jouant au hockey sur luge avec ses collègues et amis de l’HME pour les tenir au courant des progrès remarquables de l’adolescente.
Raphaëlle n’est pas quelqu’un qu’on oublie facilement. M’hamed Benmokhtar, un infirmier qui l’a soignée à l’unité d’hématologie-oncologie, tient ces propos : « Certaines jour – nées quand c’est un peu plus difficile à l’unité, je pense à la force de Raphaëlle et ça m’inspire à continuer à travailler fort et à donner le meilleur de moi-même. »