La découverte de nouveaux gènes pour les grossesses môlaires met en lumière leur incidence accrue chez les femmes âgées de 35 ans et plus

La découverte de nouveaux gènes pour les grossesses môlaires met en lumière leur incidence accrue chez les femmes âgées de 35 ans et plus

18 novembre 2024

Des avancées majeures réalisées à l’IR-CUSM pourraient aider à mieux conseiller les personnes souffrant d’infertilité, d’insuffisance ovarienne prématurée, de fausses couches récurrentes et de môle hydatiforme androgénétique.

Montréal, le 18 novembre 2024 — Une grossesse môlaire, aussi appelée môle hydatiforme, est une grossesse humaine anormale sans embryon marquée par une croissance excessive des cellules qui forment le placenta. La forme courante des grossesses môlaires touche une grossesse sur 600 au Québec. La moitié de ces môles sont androgénétiques, c’est-à-dire qu’elles ne contiennent que les chromosomes du père et pas ceux de la mère, et leur fréquence est multipliée par 10 avec l’âge maternel avancé. En raison de l’hyperprolifération de leurs cellules, les môles androgénétiques peuvent devenir malignes et conduire à un cancer du placenta dans près de 15 % des cas.

Des scientifiques de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) ont récemment découvert six nouveaux gènes — FOXL2, MAJIN, KASH5, SYCP2, HFM1 et MEIOB — qui engendrent des môles androgénétiques récurrentes, des fausses couches récurrentes et l’infertilité lorsqu’ils sont mutés sur leurs deux allèles (copies du même gène) chez les patients. Cinq de ces gènes sont essentiels pour la méiose I, le processus de division cellulaire nécessaire à la production de spermatozoïdes et d’ovules chez l’homme. Des études antérieures ont établi un lien entre les défauts de certains de ces six gènes et l’insuffisance ovarienne prématurée, une cause bien connue d’infertilité féminine. En outre, cinq de ces gènes ont été associés à l’infertilité masculine.

Teruko Taketo et Rima Slim, co-auteures principales de l’étude, montrent des images de la progression méiotique dans les ovocytes de souris.
Membres de l’équipe de recherche identifiés par leurs initiales

Ces résultats, qui viennent d’être publiés dans The Journal of Clinical Investigation, amélioreront le diagnostic moléculaire des grossesses môlaires récurrentes, de l’insuffisance ovarienne prématurée et des femmes et hommes infertiles.

« Nos résultats suggèrent que les môles androgénétiques récurrentes sont un signe de vieillissement ovarien. Ils modifieront la pratique clinique actuelle en introduisant l’évaluation de la réserve ovarienne chez les patientes souffrant de môles récurrentes », dit Rima Slim, Ph. D., auteure correspondante et co-auteure principale de l’étude, scientifique senior au sein du programme de santé de l’enfant et de développement humain de l’IR-CUSM et professeure au Département de génétique humaine de l’Université McGill.

Les six nouveaux gènes s’ajoutent à quatre autres gènes également responsables de grossesses môlaires récurrentes et précédemment découverts par la même équipe (NLRP7, découvert en 2006 et MEI1, TOP6BL et REC114, découverts en 2018).

Une vaste enquête internationale

En collaboration avec l’équipe de Jacek Majewski, chercheur à l’IR-CUSM et professeur de génétique humaine à McGill, les chercheurs ont procédé au séquençage de l’exome de 75 patientes non apparentées référées par des médecins du monde entier. Ces patientes avaient eu au moins deux môles hydatiformes et ne présentaient pas de mutations dans les gènes précédemment décrits.

Les chercheurs ont ensuite vérifié si les patientes qui n’avaient pas de mutations bialléliques (sur les deux allèles d’un même gène) avaient un seul allèle défectueux dans les gènes jouant un rôle dans la méiose I et les fonctions ovariennes. Ils ont ajouté 240 patientes présentant d’autres troubles de la reproduction — référées principalement par la clinique des pertes de grossesse répétées du CUSM, fondée par le Dr William Buckett, et par le Réseau des maladies trophoblastiques du Québec, fondé par le Dr Philippe Sauthier. Ce deuxième groupe de patientes présentait soit une grossesse môlaire et au moins une fausse couche, soit au moins deux fausses couches sans grossesse môlaire.

Ils ont constaté que 14 à 28 % de ces patientes présentaient un allèle défectueux qui semblait être plus fréquent chez les patientes ayant eu au moins deux grossesses môlaires.

« Nos données suggèrent que ces variantes monoalléliques pourraient contribuer, avec d’autres facteurs, à la susceptibilité génétique de ces patientes à l’échec de la reproduction. Notre étude fournit une explication à la fréquence accrue des môles androgénétiques avec l’âge maternel avancé », explique la Prof. Slim.

Les auteurs de l’étude soulignent que les patientes présentant des variantes monoalléliques de ces gènes peuvent concevoir et avoir des enfants en bonne santé ; cependant, elles présentent un risque plus élevé d’infertilité, d’insuffisance ovarienne prématurée et de perte de grossesse que les femmes de la population générale.

Modélisation de la genèse des môles

Afin de mieux élucider les mécanismes sous-jacents à ce problème de santé et de reproduction, les chercheurs ont modélisé la maladie chez des souris présentant une déficience du gène HFM1.

« Nous avons observé plusieurs défauts qui affectent la progression méiotique, dont certains avaient déjà été observés par notre équipe chez des souris présentant une déficience du gène mei1, un autre gène responsable des môles androgénétiques récurrentes », explique Teruko Taketo, Ph. D., co-auteure principale de l’étude, scientifique senior au sein du programme en santé de l’enfant et développement humain à l’IR-CUSM et professeure au Département de chirurgie de l’Université McGill. « Dans cette étude, grâce à l’imagerie cellulaire en direct, nous avons pu visualiser et comprendre pour la première fois comment les ovules de souris touchées par un dysfonctionnement du gène hfm1 perdent tous leurs chromosomes. »

Les auteurs soulignent que l’identification du même mécanisme dans deux modèles de souris renforce sa plausibilité à l’origine de la formation de môles androgénétiques chez l’humain.

« Les môles androgénétiques ont été décrites en 1977. Aujourd’hui, nous pouvons mieux expliquer aux patientes la formation de ces conceptions aberrantes et la genèse des môles androgénétiques », affirme la Prof. Slim.

À propos de l’étude

L’étude Defects in meiosis I contribute to the genesis of androgenetic hydatidiform moles a été réalisée par Maryam Rezaei, Manqi Liang, Zeynep Yalcin, Jacinta H. Martin, Parinaz Kazemi, Eric Bareke, Zhao-Jia Ge, Majid Fardaei, Claudio Benadiva, Reda Hemida, Adnan Hassan, Geoffrey J. Maher, Ebtesam Abdalla, William Buckett, Pierre-Adrien Bolze, Iqbaljit Sandhu, Onur Duman, Suraksha Agrawal, JianHua Qian, Jalal Vallian Broojeni, Lavi Bhati, Pierre Miron, Fabienne Allias, Amal Selim, Rosemary A. Fisher, Michael J. Seckl, Philippe Sauthier, Isabelle Touitou, Seang Lin Tan, Jacek Majewski, Teruko Taketo et Rima Slim.

DOI : https://doi.org/10.1172/JCI170669

Ce travail a été principalement soutenu par les Instituts de recherche en santé du Canada et a bénéficié du soutien financier de Mitacs Accelerate en partenariat avec Originelle Inc., du Centre recherche sur la reproduction et le développement de McGill, de la Bourse Desjardins de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill et de la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université McGill.

Les chercheurs tiennent à remercier tous les chercheurs et cliniciens qui ont contribué à l’étude, ainsi que les patients et les familles qui y ont participé.

Personne-ressource pour les médias
Fabienne Landry
Coordonnatrice des communications, Recherche, CUSM
[email protected]
514 812-7722

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